Aborder la mort à l’école : comment en parler aux enfants ?

De nombreux enfants sont confrontés à la mort au deuil durant leur scolarité et avant l’adolescence, indique Yves Alphé. S’il s’agit en général d’un proche âgé (ex: grands-parents), certains cas plus rares peuvent se produire comme le décès de quelqu’un de la famille proche, d’un professeur ou d’un camarade de classe par exemple. Yves Alphé évoque alors comment l’évènement est abordé en milieu scolaire auprès des enfants.

Le tabou de la mort, omniprésent rappelle Yves Alphé

Le salon de la mort, pour lever le tabou

Le salon de la mort, pour lever le tabou

Ça n’est pas seulement le concept de la mort qui est tabou dans nos sociétés, mais également le mot en lui-même : l’on parle parfois de personne disparue, de proche perdu, qui nous a quitté…autant de moyens de contourner un terme qui effraie et sur lequel nous n’avons pas le contrôle explique Yves Alphé.

En témoignent les nombreuses revendications sur l’euthanasie ou « suicide assisté » : peut-on choisir la mort pour autrui? Peut-on essayer de la contrôler ?

Un autre exemple que présente Yves Alphé est la résistance et la polémique sur la création du Salon de la mort, qui aide cependant à démocratiser ce concept auquel nous sommes confrontés en tant que personne endeuillée mais également en tant qu’être humain. Par ailleurs, évoquer ses dernières volontés de façon claire et précise à son entourage reste là encore un sujet tabou ajoute Yves Alphé. On ne parle pas de la mort directement, on l’écrit par exemple dans un testament ou via un contrat de prévoyance prenant effet post-mortem. Comme si parler de la mort allait l’attirer à nous.

Le vécu des enfants

Yves Alphé rappelle que l'enfant ne vit pas de deuil comme un adulte

Yves Alphé rappelle que l’enfant ne vit pas de deuil comme un adulte

Comme tout individu, l’enfant a sa propre perception de la mort selon son éducation, son vécu, sa culture…et son âge. En effet, plus l’enfant est jeune plus il conçoit ce concept comme une réalité lointaine qui ne peut pas les affecter ni affecter ceux autour d’eux, explique Yves Alphé.

Cependant, une fois un décès survenu dans l’entourage de l’enfant, celui-ci tend, comme beaucoup d’adultes également, à ressentir un sentiment d’injustice. A ce sentiment difficile vient s’ajouter l’incompréhension, en particulier chez les enfants entre 3 et 10 ans, rappelle Yves Alphé. Certains même peuvent éprouver un sentiment de culpabilité ou craindre une autre disparition dans ses proches, voire-même sa propre disparition, comme si la mort était une maladie contagieuse.

Enfin, même si les émotions et les questionnements envahissent l’esprit de l’enfant, ce dernier peut ne très bien rien extérioriser et continuer à jouer comme si de rien n’était. Ce comportement bien que surprenant est pourtant assez répandu. L’enfant peut extérioriser bien plus tard et vivre une phase de déni particulièrement longue, explique Yves Alphé.

Le rôle de l’enseignant

Les explications du concept de mort

Le rôle de l'enseignant est crucial

Le rôle de l’enseignant est crucial

L’un des rôles de l’enseignant au sein de la classe est de représenter une personne de confiance, sans toutefois se substituer à la famille. C’est pourquoi il doit, au moment de s’adresser aux enfants se montrer honnête en expliquant les choses telles qu’elles sont. En effet, ajoute Yves Alphé, s’il est tentant d’expliquer la mort aux enfants par des métaphores, cela est généralement déconseillé.

Associer la mort à un long sommeil ou long voyage risque de stresser l’enfant qui aura peur de mourir au moment de dormir ou qui sera en perpétuelle attente de voir le proche revenir de son voyage.

Il est par ailleurs préférable de ne pas attendre une tragédie avant d’aborder le sujet. En effet, si l’on explique la mort à un enfant en deuil, le sentiment d’incompréhension risque de s’accentuer et l’approche du concept de la mort n’en sera que plus difficile, rappelle Yves Alphé. L’une des meilleures choses à faire est d’expliquer dans le calme ce qu’est la mort (même s’il n’est pas facile de mettre des mots sur une chose que l’on ne maîtrise pas), qu’elle n’est pas réservée qu’aux personnes malades ou âgées et que c’est un processus naturel.

Bien sûr, il convient de rassurer l’enfant en lui expliquant que si des cas graves arrivent, cela reste relativement rare. Dans tous les, Yves Alphé indique que le dialogue (avant ou après un décès) reste primordial pour permettre à l’enfant d’effectuer son ou ses deuils futurs.

Que faire en cas de deuil commun ?

Si par exemple survient le décès d’une personne de l‘établissement scolaire (salarié, enseignant, camarade de classe…), l’enseignant doit trouver des moyens pour aborder le sujet et ne pas en faire abstraction en restant honnête sur le drame produit (sans rentrer dans de morbides détails) et en invitant chaque enfant à exprimer son ressenti, conseille Yves Alphé.

Des ateliers pour rendre hommage au disparu peuvent également être mis en place (parler des souvenirs que l’on avait avec cette personne) et dans certains cas les classes peuvent participer aux funérailles, ce qui peut les aider à « dire au revoir » à la personne décédée et être confrontées à la cérémonie d’obsèques.